Episode 11
11-MONSIEUR HYACINTHE L'ÉPICURIEN
....Tous nos fournisseurs devaient impérativement nous livrer au chalet dans l'heure.
Lors de l'arrivée des enfants et de Madame ils étaient accompagnés d'un intouchable: Monsieur Hyacinthe.
C'était un monsieur distingué de huitante ans toujours tiré à quatre épingles. Il était palestinio-israélo-jordanien; s'exprimait couramment en cinq langues dont l'arabe, le turc, le perse, le français et l'hébreu.
Ancêtre adoptif de la famille, il servait de passerelle & de public-relation pour servir les intérêts de monsieur dans les affaires du groupe au Moyen-Orient et dans la région du Bosphore.
Il ne pratiquait pas le ski mais, il "pratiquait" seul son petit déjeuner dignement sans bruits, auprès de la cheminée.
Nous avions pour instruction de lui servir tout ce dont il désirait.
C'est ainsi qu'un matin, il demanda des œufs frits à l'américaine, du bacon de canard, des pommes de terre soufflées, du pain poilâne, escorté d'un verre de chateau pétrus mil neuf cent soixante et un !
Un autre matin il demanda des crêpes suzettes accompagnées d'un verre de château yquem, d'un fromage basque d'osso-iraty et un verre d'Irouléguy, c'était souvent difficile de satisfaire ses attentes !
On cuisina pour son anniversaire des beignets de fleurs de courgettes, un gigot pré-salé de sept heures avec un gâteau de pommes anna, petits légumes farcis; le tout escorté d'un mercurey clos du roy, puis d'un un roederer-christal rosé autour d'une omelette soufflée Rothschild
C'était un épicurien distingué, mes cuisiniers devaient réviser fréquemment leurs cours, étudier des recettes oubliées ou plus du tout enseignées à l'école hôtelière.
Veuf, il vivait des moments de solitude prégnantes que sa famille adoptive recomposée ne savait pas comprendre ou entendre.
Notre employé Turc avait été désigné pour lui servir de valet de chambre, le couple fonctionnait bien et s'engueulait copieusement ce qui est normal sous "ces latitudes" c'était la tête de turc idéale de M. Hyacinthe !
M. Hyacinthe me donnait exclusivement ses consignes et désirs, j'étudiais avec lui la faisabilité de ses humeurs raisonnablement.
Quelquefois on visitait les étoilés Michelin locaux, Martin à Vevey, de Courtens à Sierres, il raffolait particulièrement des meringues à la double crème de Gruyère.
Lorsque la famille s'absentait la journée pour Milan, Genève, Zürich je restais avec lui . Il avait un attachement gastronomique particulier pour l'hôtel-restaurant de la poste à Château d'oex qui servait une soupe au foin exceptionnelle et des ris de veau braisés divins.
La nuit de Noël se passa autour d'une tartiflette à la tomme fraîche de Rougemont du célèbre fromager-affineur : Jacques Duttweiler, et d'un gruyère-caramel.
Pendant que les enfants s'amusaient à cuire des pommes de terre dans les braises, les adultes assistaient à la préparation d'une tarte tatin parfumée à la vanille , évidemment servie avec de la double crème .
Au moment du désert, j'avais fait venir des joueurs de corps des alpes qui interprétèrent des cantiques de noël.
A l'office chacun chantait dans sa langue maternelle le même cantique.
La distributions de cadeaux eut lieu autour d'un vin chaud, nous nous étions retiré les laissant vivre dans l'intimité la célébration de la nativité.
Le père-noël s'arrêta également pour l'ensemble du personnel.
The mystery Butler | Jules mountbrion