Résumé de la fin de l'épisode précédent
Lors de son hospitalisation, j'avais volontairement occulté quelques informations concernant la disparition d'amis et de connaissances:
"Jules, vous êtes de bon conseil, c'est douloureux, mais ce n'est pas trop sensible, mon père est un guerrier, il sait que la vie est une plus ou moins longue retraite devant la mort, il ne vous en tiendra pas rigueur."
Au service de son père à cent pour cent depuis quelques années, j'étais un peu las. J'osais suggérer qu'il serait bien qu'un majordome débutant soit engagé pour me seconder. Un ou une jeune collègue me laisserait quelques marges de manœuvre, me permettrait d'avoir des moments de liberté & de vivre ma vie privée épanouie. Fallait-il encore que mon monsieur tolère la présence d'une autre personne à son service.
Le fils me donna son accord, mais en informerait son père. Je devais moi-même rechercher et recruter la perle rare. J'ignorais à cet instant que ce recrutement serait long et fastidieux.
Episode 14
Résumé de la fin de l'épisode précédent
Lors de son hospitalisation, j'avais volontairement occulté quelques informations concernant la disparition d'amis et de connaissances:
"Jules, vous êtes de bon conseil, c'est douloureux, mais ce n'est pas trop sensible, mon père est un guerrier, il sait que la vie est une plus ou moins longue retraite devant la mort, il ne vous en tiendra pas rigueur."
Au service de son père à cent pour cent depuis quelques années, j'étais un peu las. J'osais suggérer qu'il serait bien qu'un majordome débutant soit engagé pour me seconder. Un ou une jeune collègue me laisserait quelques marges de manœuvre, me permettrait d'avoir des moments de liberté & de vivre ma vie privée épanouie. Fallait-il encore que mon monsieur tolère la présence d'une autre personne à son service.
Le fils me donna son accord, mais en informerait son père. Je devais moi-même rechercher et recruter la perle rare. J'ignorais à cet instant que ce recrutement serait long et fastidieux.
Episode 14
1-Les retrouvailles.
Toute la famille se transporta en "viano" à l'hôpital américain pour rejoindre le patriarche et le ramener à la maison familiale. Je n'étais pas du voyage j'avais à finaliser la partie administrative.
L'union auprès de monsieur était essentielle pour colmater les petites fissures familiales et apaiser les moments de doute de l'héritier.
Je laissais la fusion s'opérer, je voulais simplement me retirer...un tout petit peu. J'avais oublié que j'appartenais "partiellement" à la famille. Mais où est Jules ?
Jules rejoignit sa famille d'adoption avenue Montaigne, au relais plaza pour un déjeuner familial autour du fameux poulet à la broche ( le plus cher, mais le meilleur au monde).
2-Déjeuner familial au relais-plaza.
A mon arrivée, "l'héritier" me fit asseoir à gauche de son père.
Je n'étais pas un employé ordinaire mais un "greffon", une pièce rapportée...en voie d'adoption..
La première semaine suivant ma prise de fonction, j'avais rapidement admis que ma situation était particulièrement particulière.
( lire mon monsieur chapitres de 1 & 2)
Ma relation avec la famille était totalement différente des relations professionnelles et humaines que j'avais eu dans des fonctions antérieures.
Je ne travaillais pas pour cette famille, mais avec toute la famille.
La confiance et la fidélité de ses membres à mon égard, était à ma grande surprise, accompagnée ce jour-là, d'un petit discours.
C'est Madame belle- fille qui, avant le poulet à la broche, me lut un touchant hommage au nom de toutes & tous.
Toute la famille écoutait madame, tout le monde était complice, dont "mon monsieur".
Aprés le discours, le plus jeune fils vint me remettre une enveloppe contenant 20 images de Jacob Bukhardt, sa petite sœur m'offrit un écrin renfermant une splendide montre Suisse extra plate en or avec un cadran en or bleu.
Tout soudain ma lassitude s'estompait...un peu...
Dans les yeux de mon Monsieur, je lisais sa satisfaction, son plaisir. Plaisir qu'il partageait avec toute sa famille. Je n'étais pas dans un rêve, je vivais intensément un unique moment dans ma carrière.
Je me souvenais des paroles de mon papa : "celui qui sème la gentillesse récolte l'amitié". Ce jour-là, la récolte était abondante.
Mon père ajoutait également : "la gentillesse est une clé qui ouvre toutes les portes". Je découvrais à cet instant qu'elle ouvrait aussi celle des coffres-forts et de la gratitude de "mon" autre famille.
Je mesurais ma chance, j'avais un poste exceptionnel auprès d'une famille exceptionnelle. Cette famille disposait de deux fortunes : l'argent et l'intelligence du cœur, ils appréciaient ma bonne humeur, mes compétences ainsi que mon omniprésence auprès de leur père et grand-père.
Après la perte de son épouse, il avait mal vécu son début de "veuvage" ainsi que la passation des clés de l'entreprise à son fils, mon arrivée avait été opportune.
Aujourd'hui j'étais comblé, la famille n'avait pas oublié mon dévouement en ces temps difficiles, j'étais gratifié.
Au cours de ce repas, mon monsieur décida de m'adjoindre un majordome, m'annonça la reprise des déjeuners dominicaux une fois par mois et lors d'événements familiaux ou religieux.
La famille et moi, protestants, nous ne risquions pas d'être envahis par les fêtes religieuses à l'exception de la célébration de la fête de la réformation tous les vingt-quatre août, et un petit séjour à Mialet dans les Cévennes pour assister au rassemblement protestant international le premier dimanche de septembre.
3-L'éveil de la maison familiale.
J'étais fier de participer à l'éveil cette vielle demeure.
Je me considérais un peu comme un architecte des arts de la table, une sorte de metteur en scène de l'harmonie. J'aimais beaucoup marier les beaux objets, les métaux précieux, les faïences, les étoffes. J'appliquais quotidiennement les conseils de mon professeur de service de l'école hôtelière :
"Vous êtes des acteurs et des comédiens, votre spectacle doit être tout le temps et toujours tip-top".
Etudiant d'une excellente école hôtelière, j'avais validé ma formation dans des palaces de renommée internationale.
J'avais eu le privilège d'être sous les ordres d'éminents directeurs de restaurants et de grands maîtres d'hôtel très formels, très stricts sur les mises-en-place des tables.
Mes formateurs m'avaient enseigné l'art du flambage, la précision des découpages, la science des préparations & des finitions en salle.
À la résidence j'exprimais et j'exprimerais encore longtemps ce que j'avais reçu de mes mentors Suisses.
Je sais pas quels mots utiliser pour partager avec vous, le plaisir & la fierté que j'éprouvais en dressant la table de cette splendide salle à manger.
Le "matériel" de la résidence était tout simplement royal & impérial, toutes les vaisselles provenaient de la manufacture impériale de Sèvres, et de la manufacture Dihl & Guerhard.
Presque toutes les assiettes étaient peintes & dorées à la main. Le motif de chaque assiette était unique, sauf celles qui comportaient le chiffre de la famille.
Elles étaient rangées dans un meuble marqueté. Ce placard de luxe disposait d'alvéoles tapissées d'une feutrine vert-empire.
Chaque alvéole était conçue de manière à ne loger qu'une seule et unique assiette. Il était estampillé : ‘’Biennais au singe violet’’.
L' argenterie était également poinçonnée par Martin-Guillaume Biennais (1764-1843). Premier orfèvre de l'Empereur Napoléon Ier, on lui doit la fabrications de plaques et d'ordres de chevalerie très prisées par les collectionneurs de phaléristique, ainsi que de fabuleuses pièces de service de table. L'ensemble de la ménagère avait été conçus pour être transporté, il était protégé dans une remarquable malle comportants systèmes et tiroirs capitonnés.
Dés mon entrée au service de la famille, j'avais déjà utilisé précautionneusement cette remarquable vaisselle conscient de sa valeur et du privilège d’en être le conservateur.
4-La rentrée en classe.
Les enfants partis skier à Verbier en Suisse, je partageais mon temps entre la résidence et les bureaux de la direction générale.
Je devais diriger le travail des femmes de chambre, de ménage et autres compagnons. Invité par les couvreurs à valider leurs travaux de toiture endommagée suite à la tempête. Je priais les jardiniers de nous rejoindre afin de découvrir une vue d'ensemble et, de convenir des "dernières retouches" pour joindre l'utile à l'agréable.
La semaine qui suivit fut le retour de mon monsieur au siège, à la tête de l'entreprise familiale, je l'accompagnais.
Le jour de sa rentrée en "classe affaire" ce jour-là, il me confia une mission particulière.
J'avais reçu de nombreuses et curieuses demandes dans l'hôtellerie et au service de familles privées; j'avais toujours répondu et presque toujours obtenu ce que mon client souhaitait.
Cette fois-ci, c'était particulier; il s'agissait d'un travail mémoriel.
Je restais seul dans la salle de conférence pour prendre connaissance du dossier douloureux concernant les derniers instants de son fils ainé mort pour la France en Indochine en 1953.
Quarante-cinq ans après les faits, je remontais la piste militaire pour retrouver les derniers témoins, les éventuels survivants de ce drame.
5-Les rizières de l'honneur.
Au début de mon enquête, je contactais différentes administrations, ministères & associations. J'étais surpris de constater le nombre important de fonctionnaires en réunion, en conférence, rtt, absents, ou très certainement dissimulés derrière un écran d'ordinateur.
Le fils ayant reçu la légion d'honneur, j'eus l'idée de présenter au palais de Salm . Munis des documents militaires du père & du fils, je fus respectueusement reçu à la grande chancellerie de la légion d'honneur.
J'entrais avec émotion dans les splendides bureaux pour y rencontrer des militaires et des fonctionnaires exceptionnels.
Dans ce temple de l'honneur j'ai croisé l'amabilité et l'efficacité, me permettant d'accéder aux bonnes portes, & de retrouver ainsi les trois survivants de l'apocalypse...Je décidais de les contacter le soir même.
Des bureaux de la société, nous organisions les jours qui suivirent une conférence téléphonique entre mon monsieur et les trois derniers camarades de son fils. Il en avait envie, mais il en avait peur.
Avant de disparaître, monsieur souhaitait en compagnie des trois ex-militaires revivre les derniers instants de son fils ainé et comprendre les circonstances de ce drame.
Ce jeune lieutenant était tombé "mortellement blessé" dans une rizière d'Indochine. Il était mort au service de France, Il y avait quarante-cinq années, il avait juste vingt-cinq ans.
Je comprendrais dans quelques jours l'importance de mes recherches.
The mystery Butler | Jules mountbrion