Episode 02
Son père et moi avons mis beaucoup de temps pour "nous apprivoiser" il me testait: je le testais.
Il avait du mal à se résigner , "à accepter ma tutelle d'assistant de vie .
Ne plus tenir les rênes du pouvoir rongeait l'esprit de l'ancien, il vivait une immense lacune difficile à combler. Sa vie était devenue un immense vide.
Le téléphone ne sonnait presque plus, les invitations devenaient rares, l'institution qu'est l'inactivité s'instaurait petit à petit .
Il avait pris une très mauvaise habitude, celle de lire la rubrique nécrologique du Figaro.
Au début nous étions â tous les services religieux "les pots de départ" ce que l'on appelle en Suisse: "collation après ensevelissement," ce style de cérémonie n'est pas faite pour remonter le moral quand on est au crépuscule de sa vie ...
En repos le WE , mon retour le lundi ressemblait au retour du fils prodigue.
Je l'avoue nous commencions à souffrir l'un de l'autre: nous nous attachions.
Pendant mon repos hebdomadaire j'allais au marché au marché aux puces de la Porte de Vanves le samedi matin.
Le dimanche à 10.30 j'assistais au culte à l'oratoire du Louvre ou au temple du St Esprit rue Roquépine.
Les après-midi je visitais les expositions, les musées, j'allais au cinéma quelques fois je me baladais en famille autour du grand canal du château de Versailles.
L'hiver, je clôturais mon périple au Trianon Palace dont le buffet de pâtisseries était la suite des "grandes eaux" du château, mes petits princes adoraient les entremets .
Quelques mois après mon entrée au service de monsieur, je le retrouvais mal-en-point le lundi matin puis tous les lundis matin.
J'avais noté qu'il mettait du temps à sortir de sa chambre et qu'il manquait de rigueur vestimentaire.
Un vendredi soir, il feint de se trouver mal; Je renonçais donc à mon repos hebdomadaire et restais avec "mon monsieur".
Je dormis dans ma nouvelle résidence la chambre en face de celle de mon monsieur je ne savais pas que j'allais y vivre presque 10 ans.
Le matin suivant, je pris mon petit déjeuner avec lui ce qui le surprit.
"Je ne travaille plus pour vous lui ai-je répliqué ! mais avec vous ! puisque je vais désormais vivre auprès de vous .
En plus c'est mon jour de congé"... il se mit à rire, dés ce jour-la il décida de me tutoyer.
C'est ainsi que je devins un garde malade de luxe à résidence jusqu'à
sa disparition 10 ans plus tard.
Désormais nous devions composer notre programme à deux puisque j'étais avec lui 7/7 jours. Ma gentillesse, mon dévouement, ma disponibilité étaient mises à rude épreuve, je devais m'intégrer diplomatiquement et assumer aussi ma petite famille qui sera petit à petit acceptée et intégrée.
Cette nouvelle situation arrangeait le fils et la belle famille qui échappaient ainsi aux déjeuners dominicaux.
Cette nouvelle situation augmentait mes gages confortablement.
Désormais ma résidence de "domiciliaire" me conférait le statut de presque membre de la famille. J'entrais dans la sphère privée d'une belle et grande dynastie parpaillote au service de la France depuis le directoire.
Je vous retrouve avec plaisir, dans deux semaines pour un autre épisode de la vie de mon monsieur.
The mystery Butler | Jules mountbrion